« Nous laisserons passer d’autres avant nous pour l’attribution des aides » (B. Macé, Trans Musicales)
Par Thomas Corlin | Le | Lieux, résidences, locaux de répétition
L’incontournable festival breton a revu son programme à la baisse pour s’adapter aux conditions sanitaires : moitié moins de concerts, un dispositif sanitaire strict, mais une programmation toujours fidèle à l’esprit des Trans Musicales. Sa cofondatrice Béatrice Macé revient sur la genèse de cette édition particulière.
Quand avez-vous pu décider de lancer cette édition ?
Dès le confinement, nous avons d’abord passé deux semaines à gérer des problèmes administratifs liés à la situation, comme tout le monde. En mars, les directeurs artistiques du festival, Jean-Louis Brossard et Mathieu Gervais, étaient déjà engagés sur une partie de la programmation. D’avril à septembre, nous avons alors travaillé sur différents scénarios, jusqu’à en faire six, avec une douzaine d’hypothèses selon les jauges.
Nous avons élaboré six scénarios et une douzaine d’hypothèses.
Tout d’abord, la configuration assise ne nous a pas totalement paniqué. Après tout, les Trans Musicales ont commencé ainsi, en 1979. Mais cela signifiait que nous devions abandonner notre espace principal, le Parc Expo, dont l’aménagement en configuration concerts avec des gradins représenterait un coût disproportionné avec la capacité de public à laquelle nous contraignent les mesures sanitaires.
Nous avons donc basculé le festival sur un réseau local de lieux partenaires, avec lesquels nous avons souvent collaboré pour des dates ponctuelles par le passé, comme le Liberté, l'Aire Libre, l'Antipode ou le Théâtre National de Bretagne. Une sorte de chaîne collaborative s’est instaurée entre ces établissements depuis le début de la crise, comme à Angers. Ils disposent déjà d’une configuration assise et proposent tous des jauges de moins de 1 000 spectateurs. À partir de là, il était possible de voir quelle édition nous pourrions faire - même si personne ne peut affirmer qu’elle aura vraiment lieu au final.
Quels ajustements la situation a-t-elle engendré par rapport aux précédentes éditions ?
Par le passé, les Trans Musicales recevaient jusqu’à 7 000 festivaliers le jeudi, et 13 600 le vendredi et le samedi. Cette année, au plus fort du festival, nous aurons une capacité de 2 000 personnes, dont 750 au Liberté.
Les Trans Musicales proposent une sorte de sono mondiale, et certains artistes ne pouvaient pas venir du fait des restrictions selon les pays.
L’affiche propose normalement près de 90 groupes. Cette fois-ci, elle en proposera 42. En juillet, la programmation était déjà faite, il a fallu alors refaire une programmation dans la programmation. Les Trans Musicales proposent une sorte de sono mondiale, et certains artistes ne pouvaient pas venir du fait des restrictions selon les pays. Par chance, certains groupes ne vivent pas dans leurs pays de naissance et nous sont ainsi plus proches. Plusieurs concerts ont pu être sauvés, en même temps que la diversité de l’offre.
Enfin, c’est aussi le public qui sera restreint. Il va nous falloir ajuster notre communication pour qu’elle soit la plus préventive et la plus claire possible. Nous prévoyons d’envoyer aux festivaliers un plan des lieux avec les règles de circulation et les contraintes à respecter - danser ne sera pas autorisé, par exemple.
Envisagez-vous toujours une rentabilité pour le festival ?
Nous ne l’avons même pas calculée. Ce qui est sûr, c’est que les prochaines subventions ont été confirmées sur notre territoire, les sommes sont soit déjà versées soit en cours de l’être. Les pouvoirs locaux sont à l’écoute, nous rencontrons la préfecture tous les mois - ce n’est pas le cas partout.
Les Trans Musicales ne sont peut-être pas le festival ou la structure la plus dans l’urgence actuellement. Nous bénéficions d’une convention d’objectifs avec nos tutelles, qui court jusqu’en 2022, ce qui nous garantit une certaine stabilité. Quand il s’agira de demander des aides, nous laisserons probablement passer d’autres structures avant nous, c’est la moindre des solidarités.
Néanmoins, nous nous engageons désormais dans la production de cette édition, et donc dans des frais, ce qui nous met dans une certaine fragilité, d’autant que nous n’avons aucun moyen de nous assurer qu’elle aura bien lieu. Malgré tout, nous entendons nous engager auprès des artistes et des prestataires, dont certains sont au bord de la faillite. Il s’agit de statuer sur une avance en signant nos contrats avec eux, qui ne nous serait pas remboursée en cas d’annulation. Le chiffre de 30 % circule, il reste à confirmer.