Comment la scène nationale de Chambéry gère l’éventuel basculement de zone rouge à zone verte ?
Par Thomas Corlin | Le | Billetterie, data
Avec la variation des jauges autorisées selon le niveau d’urgence sanitaire, les billetteries des salles de spectacle improvisent des marches à suivre en cas de basculement de zone rouge à verte. L’exemple de Malraux Scène Nationale à Chambery, actuellement en zone verte, avec son secrétaire général Alexandre Bourbonnais.
Quel protocole avez-vous mis en place au niveau de votre billetterie pour parer à un éventuel changement de zone pour votre département ?
Jusqu’au 7 septembre, nous avons fonctionné avec un système de places non numérotées, les spectateurs qui réservent n’étaient donc pas placés dans la salle, ce qui nous laissait une marge de manœuvre. Depuis, nous avons restauré la numérotation en salle et placé les spectateurs qui avaient déjà des billets.
Faire comme si nous étions en zone rouge et travailler en jauges limitées par prévention présentait un risque financier. Par expérience, avant la crise, lorsqu’un spectacle était annoncé complet, mais que des places se libéraient quelques temps avant la date, les réservations ne repartaient pas. Nous en avons conclu qu’annoncer un spectacle « sold out » était irréversible en général, l’information ne pouvait pas « s’effacer », en quelque sorte.
Faire comme si nous étions en zone rouge et travailler en jauges limitées par prévention présentait un risque financier.
Il en va de même d’annoncer qu’un spectacle est plein en jauge limitée selon les critères de la zone rouge, pour finalement remettre des places en vente si la région demeure en zone verte à l’approche de la date. Le public n’aurait pas le temps d’identifier que d’autres places sont libres.
Ainsi, pour Alex Lutz par exemple, qui joue les 17 et 18 septembre chez nous, les spectateurs seront masqués sans distanciation, en jauge pleine. Si ça devait changer, on ajustera, il nous reste quelques places en salle. Il s’agit par ailleurs d’un spectacle reporté, la moitié de la salle avait déjà sa réservation.
Si le département passait en zone rouge et que certains de vos spectacles étaient complets en jauge pleine, comment procéderiez-vous ?
Il faudra d’abord voir combien de spectateurs préfèreraient renoncer à venir au spectacle, du fait de la hausse du niveau d’alerte sanitaire, et préférer un report ou un remboursement. Ensuite, les groupes d’invités, les scolaires, souhaiteraient peut-être aussi annuler leur venue pour les mêmes raisons. Cela libèrerait des places que l’on pourrait redistribuer. Aussi, nous gardons toujours des places sur les côtés, en haut de la salle.
Quelle masse de travail supplémentaire la situation engendre-t-elle pour les services dont vous avez la charge ?
Le travail de replacement n’appartient pas à nos tâches habituelles, cela nécessite beaucoup de travail additionnel, donc un suivi plus vigilant et beaucoup de réactivité. Par ailleurs, certaines tâches s’effectuent par ordinateur, mais notre logiciel n’est pas prévu pour certaines manipulations qu’imposent la situation. Le replacement se fait parfois à la main.
Pareillement, le travail en communication a doublé et même changé de nature. Comme en temps normal, nous faisons tout notre possible pour présenter les spectacles, inciter les gens à les voir, voire tout simplement, dans la situation actuelle, signaler qu’il y en a. Une autre mission s’est superposée, une mission de santé publique qui consiste à rassurer notre public, à rappeler les messages de préventions, insister sur nos dispositifs sanitaires, etc.
Nous faisons des rencontres avec le public pour présenter notre saison et nos diverses activités. En juin dernier, les gens étaient saturés par la pandémie et nous avons surtout parlé des spectacles. Depuis la rentrée, les questions de sécurité et de remboursements sur la billetterie sont celles qui reviennent le plus.
La temporalité de notre communication aussi a changé. C’est un mouvement qui était en cours et qui s’est accéléré pendant la crise. Du fait des activités de La Base, tiers lieu qu’abrite désormais Malraux Scène Nationale, nous avons abandonné notre plaquette annuelle pour un programme trimestriel, plus en accord avec la vie des associations et les fluctuations de la pandémie.
Les tutelles ont-elle émis des directives à ce niveau ?
Le volume des ventes est celui que nous avons normalement en juin.
Le dernier vade-mecum en date émis par le Ministère de la Culture date de juillet et ne concerne que les consignes sanitaires. Les lieux s’organisent en interne comme ils le peuvent, nous échangeons régulièrement pour partager d’éventuelles astuces. Nous sommes en contact régulier avec la Mairie et la Préfecture, mais les solutions viennent de nous.
Comment se comporte votre public en terme de réservations, sachant que vous êtes en zone verte ?
Comme beaucoup de salles de spectacle, nous n’avons rouvert notre billetterie qu’à la fin août, alors que normalement les réservations pour la nouvelle saison sont possibles dès juin. La courbe des ventes est à peu près la même, mais nous avons donc un décalage. Le volume des ventes est celui que nous avons normalement en juin.
Les gens n’ont peut-être pas encore la tête à ça. Certains viennent pour réserver un ou deux spectacles, mais ils ne prévoient pas leur saison entière. Il se passe un peu la même chose qu’avec les clubs de sport : les gens ne souhaitent pas s’engager sur le long terme par peur que les lieux publics ne ferment à nouveau. Malgré tout, nos abonnés sont pour la plupart revenus.