#rentrée2020 : « On ne relance pas un spectacle sur un claquement de doigts » (P. Deballon, Weezevent)
Par Thomas Corlin | Le | Billetterie, data
Pierre-Henri Deballon de Weezevent, logiciel de billetterie destiné à l’événementiel et aux festivals (Hellfest, Main Square, Lollapalooza…).
Comment la crise sanitaire vous a-t-elle atteint ?
Nous ne payons pas nos salaires avec la trésorerie de nos clients, contrairement à certains concurrents qui sont actuellement en apnée.
Dès fin février, on a vu la vague arriver avec le Salon de l’Agriculture, dont on a dû organiser le remboursement des entrées. Nous avons rapidement chuté à 5 % de notre activité normale. Ces 5 % restant sont composés de web-conférences, d’ateliers musicaux, de dégustations de vin ou d’adhésions à des associations.
Heureusement, notre business model ne repose pas sur la billetterie de nos clients, on ne perçoit aucun pourcentage. On met à leur service une technologie, et c’est cela qu’ils achètent. Nous ne payons pas nos salaires avec la trésorerie de nos clients, contrairement à certains concurrents qui sont actuellement en apnée. Ainsi, nous n’accusons pas de pertes massives, d’autant que le chômage partiel nous a permis d’amortir le choc.
Le défi a été pour nous de gérer soudainement une masse d’annulations que nous n’avions jamais connue. Rapidement, nos développeurs ont mis en place une plateforme automatisée de remboursement. Grâce à nos partenariats avec des banques et à la saisie d’un code barre, les détenteurs de billets pouvaient très rapidement se faire rembourser, sans avoir par exemple à rentrer un RIB ou envoyer un courrier.
Du côté de nos clients, les réactions étaient diverses. Certains étaient incrédules, d’autres, qui avaient connu l’H1N1 ou connaissaient bien la Chine, ont vite compris ce qui allait se passer. Les plus fragiles se sont particulièrement accrochés pour tenter le maintien de leur événement.
Quelle part du public a choisi de faire don de son billet ?
C’est minoritaire, clairement, de l’ordre de 5 % peut-être. Environ 30 % ont tout de même fait don d’une partie de leur billet. Concernant certains festivals reportés, beaucoup de gens ont gardé leur pass d’une année sur l’autre. C’est le cas par exemple du Hellfest, le billet étant quasiment un totem à décrocher et donc à conserver.
Comment vous projetez-vous dans la rentrée ?
Nous avons retrouvé environ 15 % d’activité, grâce à des reports ou des nouveaux événements sur des dates très éloignées. Il s’agit surtout de festivals déplacés à l’été prochain, mais les ventes repartent très timidement.
On ne relance pas un spectacle sur un claquement de doigts. Il faut lancer la communication, ré-enclencher la logistique de production, etc. La reprise sera difficile pour nos clients.
Il n’y a pas de lecture claire de la situation, et aucune position tenable économiquement. Les organisateurs ne peuvent donc envoyer de message fort à leur public, et les inciter à réserver des places. Pour l’instant, pratiquement tout est encore à l’arrêt.
Un client important, le Mondial de l’Auto, a déjà procédé à des licenciements. Cela ne rassure pas sur la santé de l’événementiel, et donc sur celui du spectacle.