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Patrimoine : le Musée départemental d’art religieux de Sées (Orne) se double d’un musée numérique

Le | Médiation

À l’initiative du Conseil départemental de l’Orne, le Musée départemental d’art religieux de Sées lance son projet Hors les murs. L’établissement se réinvente sous la forme d’un musée numérique pour valoriser ses collections. Cheffe de la mission Patrimoine et Musées au Conseil départemental de l’Orne, Florence Caillet-Baraniak revient sur la réalisation de ce projet.

La page d’accueil du futur site.  - © D.R.
La page d’accueil du futur site. - © D.R.

Pourquoi avez-vous lancé ce projet Hors les murs ?

Les internautes pourront tourner autour des œuvres et les voir sous tous les angles comme s’ils étaient dans un musée physique.

Le Musée départemental d’art religieux de Sées existe depuis 1969. Il regroupe des dépôts du Musée diocésain de l’évêché de Sées et des églises communales de l’Orne. Il compte 1300 pièces avec des objets tels que des chapelles portatives, des reliquaires, de la vaisselle ou encore des éléments de piété privé. Le lieu où ces œuvres sont exposées n’est pas extensible. Peu de pièces sont présentées par rapport à ce qu’il y a en réserves. Or le numérique redéfinit la conception et la gestion de l’espace pour les musées. Il n’y a plus de barrières physiques. Nous sommes en mesure de mieux exploiter notre potentiel en présentant un plus grand nombre d’objets. Sur nos 1300 pièces, 1000 sont numérisés et visibles sur notre site.

Comment s’est déroulé la réalisation du projet ?

Le projet Hors les murs a été initié à l’été 2019. Le cabinet d’assistance à maîtrise d’ouvrage Opixido nous a accompagné dans la conception et l’élaboration des cahiers des charges. Nous sommes ensuite passés à la phase de réalisation. Avec l’aide d’un studio spécialisé et d’un photographe expert dans la capture d’œuvres d’art, nous avons engagé cette transition numérique. Plusieurs pièces sont numérisées en 2D et près de 300 le sont en 3D. Les internautes pourront tourner autour des œuvres et les voir sous tous les angles comme s’ils étaient dans un musée physique. 

Une captation 3D d’objet du musée. - © D.R.
Une captation 3D d’objet du musée. - © D.R.

Quels sont les avantages apportés par le numérique en termes de médiation ?

Depuis le 9 juillet jusqu’au 30 septembre, nous proposons une exposition qui retrace la réalisation du projet Hors les murs en accès libre et gratuit au public.

Le numérique permet d’avoir un parcours de visite plus vaste avec plusieurs entrées. La structure d’un site internet avec ses différents onglets permet d’aborder le parcours visiteur de diverses manières. Notre objectif est de présenter l’histoire de la pratique cultuelle et culturelle en lien avec nos objets religieux. Nous souhaitons mettre en valeur le patrimoine de l’Orne. Nous présentons nos pièces en expliquant le lien qu’elles entretiennent avec les bâtiments du territoire afin de raconter l’histoire de ces églises et de ces lieux de culture. Le numérique nous offre les outils adaptés avec par exemple des cartes digitales. La cartographie par le numérique nous permet d’être plus efficaces pour montrer les liens entre un objet et un lieu. Grâce au digital, nous pouvons développer davantage de supports de médiation écrits avec plus de texte explicatifs et détaillés pour accompagner les photos de chaque pièce numérisée. Cela enrichit l’expérience visiteur. 

Quelles sont les premières réactions du public ?

Notre site sera en ligne en novembre ou décembre. Depuis le 9 juillet jusqu’au 30 septembre, nous proposons une exposition qui retrace la réalisation du projet Hors les murs en accès libre et gratuit au public. Les visiteurs peuvent voir les premières pièces numérisées. Les retours sont très positifs.

Le public est marqué par le type de pièces que nous traitons. Les objets religieux sont particuliers. Leur usage se perd de plus en plus dans une société de moins en moins religieuse. Nous avons perdu l’habitude de les voir au point d’oublier leur signification et leur utilité. Certains tableaux ne sont plus compréhensibles car ils font référence à des épisodes peu connus ou oubliés par le public. Notre musée numérique apporte un axe ethnologique de compréhension sur des pratiques des sociétés anciennes.

Le peigne liturgique de Thomas Becket (XIIe siècle, ivoire, 14 x 12 cm)  - © Thierry Ollivier
Le peigne liturgique de Thomas Becket (XIIe siècle, ivoire, 14 x 12 cm) - © Thierry Ollivier

Le public se montre curieux et certains objets suscitent de l’enthousiasme à l’image du peigne de Thomas Becket, archevêque de Canterbury au XIIe siècle, en conflit sur les droits et privilèges de l’Église catholique avec le roi d’Angleterre Henri II Plantagenêt, qui le fait assassiner. Henri II semble regretter cette exécution et pour se racheter il bâtit une église à Argentan dans l’Orne. Il donne à cette église une relique, le peigne de l’archevêque, devenu saint Thomas. À cette époque, avant de mettre une tenue pour effectuer les célébrations religieuses, il fallait se purifier et se peigner.

Cette pièce croise histoire et pratique cultuelle. Nous ne voulons pas avoir une approche scientifique trop formelle. Notre volonté est d’être accessible à tous en présentant les objets de manière à faire résonner les émotions avec un discours non pas orienté sur l’histoire de l’art mais sur le vécu de vraies personnes. Notre musée physique est gratuit et nous souhaitons rester dans cette démarche d’une culture accessible à tous. Le numérique s’inscrit dans cette optique avec la possibilité de valoriser nos contenus au-delà de notre département.