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Musée : réouverture du musée Art et Déchirure à l’hôpital psychiatrique du Rouvray (Seine-Maritime)

Le | Médiation

Situé à Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime) au sein de l’hôpital psychiatrique du Rouvray, le musée Art et Déchirure accueille de nouveau le public après plusieurs mois de fermeture. Directeur de l’établissement, Joël Delaunay nous explique ce projet.

Le musée Art et Déchirure, dans l’hôpital psychiatrique du Rouvray. - © Musée Art et Déchirure
Le musée Art et Déchirure, dans l’hôpital psychiatrique du Rouvray. - © Musée Art et Déchirure

Comment avez-vous mis en place ce projet ?

Le centre hospitalier du Rouvray a mis à notre disposition un pavillon psychiatrique désaffecté pour stocker et exposer nos œuvres d’arts. Les patients de l’hôpital ont un libre accès au musée.

Désormais à la retraite, j’ai travaillé en tant qu’infirmier psychiatrique dans la médiation thérapeutique. En 1988, accompagné par mon collègue José Sagit, nous avons fondé l’association Art et Déchirure. Nous avons lancé le Festival Art et Déchirure afin de mettre à l’honneur les arts plastiques dans le domaine psychiatrique. Depuis plus de trente ans, nous collectionnons et nous présentons des œuvres d’art réalisées par des patients ou des artistes autodidactes. En tant qu’association ou établissement culturel, il est parfois difficile de changer de structure, mais cela est possible grâce à différentes méthodes notamment les partenariats.

Pendant longtemps itinérants, nous souhaitions trouver un lieu fixe pour exposer notre collection qui regroupe des centaines d’œuvres. En 2017, nous avons pu ouvrir le musée Art et Déchirure à Sotteville-lès-Rouen.  Cela est devenu possible grâce à un travail de collaboration avec le centre hospitalier de Rouvray. L’établissement a mis à notre disposition un pavillon psychiatrique désaffecté pour stocker et exposer nos œuvres d’arts. Les patients de l’hôpital ont un libre accès au musée. Cela est très bénéfique à leur séjour.  

Quel est la particularité des œuvres que vous présentez ?

Le vernissage de l’exposition André Robillard en mars 2023. - © D.R.
Le vernissage de l’exposition André Robillard en mars 2023. - © D.R.

Nos œuvres sont réalisées par des artistes indépendants et des patients. Lorsqu’un musée travaille sur son offre culturelle, il doit d’abord définir son identité et son objectif. Nous portons l’identité d’un art brut et marginal avec l’objectif de rendre visible les artistes issus du milieu psychiatrique.  Ces artistes sont très éloignés du marché de l’art et des lieux traditionnels de culture. Ils évoluent dans un contexte particulier, ce qui les place dans monde à part, loin des circuits classiques de production et d’exposition.  Lorsqu’ils produisent leurs œuvres, ils ne se soucient pas des matériaux, des formats ou des normes esthétiques en vigueur dans l’univers traditionnel de la culture, car cela est loin de leur réalité.

Par conséquent, on voit la naissance d’un art marginal, brut dans sa forme et caractérisé par des œuvres atypiques et très originales. Ce mouvement inspire de nombreux artistes contemporains. Beaucoup se sont mis à utiliser des objets de récupération pour essayer ces nouvelles formes d’expression en arts plastiques. Un établissement culturel peut être un lieu d’innovation grâce au type d’offre artistique qu’il valorise. Nous sommes heureux de voir comment notre travail permet à des artistes marginaux de devenir des sources d’inspiration pour tout le monde.

Une partie de l’équipe du musée Art et Déchirure. - © D.R.
Une partie de l’équipe du musée Art et Déchirure. - © D.R.

Vous êtes restés fermés pendant plusieurs mois. Comment avez-vous réussi à ouvrir de nouveau ?

Nous sommes une équipe de dix-huit personnes. La force du nombre et la diversité des compétences ont été des atouts majeurs pour continuer notre projet.

Comme beaucoup de musées, nous avons dû fermer en raison de la crise sanitaire. Ces événements ont fortement impacté le secteur culturel en créant une forte déstabilisation financière et humaine. Sur le plan économique, nous recevons un soutien financier de la métropole Rouen Normandie et de la région Haute-Normandie. Nous bénéficions également de déductions fiscales. Toutefois, le défi budgétaire reste de taille. Nous avons engagé des fonds propres. Nous avons également besoin d’étoffer notre pôle de médiation et de communication pour gagner en visibilité et améliorer l’expérience des visiteurs. Cela implique un recrutement et des dépenses importantes.

Nous avons pu poursuivre nos activités grâce à un excellent département des ressources humaines. Nous sommes une équipe de dix-huit personnes composée de bénévoles très engagés, d’un salarié à mi-temps, de jeunes retraités issus du monde la psychiatrie, de la culture et d’autres secteurs d’activités. La force du nombre et la diversité des compétences ont été des atouts majeurs pour continuer notre projet.

Notre plus grande force reste notre relation avec le public. Les visiteurs montrent un véritable engouement pour ce projet. Ils apprécient la singularité de notre lieu et son architecture d’hôpital du XIXe siècle. Le public aime l’originalité et la diversité de notre offre. Aujourd’hui notre collection regroupe presque 400 œuvres d’arts exposées dans notre musée de 800 mètres carrés. Les visiteurs ont accès à une exposition temporaire et à plusieurs salles à thème avec des objets exposés en permanence.