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Numérique au musée : offre payante et diversifiée pour l’exposition « Noir et Blanc » au Grand Palais

Par Thomas Corlin | Le | Médiation

Avec l’exposition photographique Noir et Blanc, trois fois décalée à cause de la pandémie, le Grand Palais (Paris 8e) expérimente des visites virtuelles avec un ticket d’entrée Ces innovations se font dans le cadre d’un engagement accru dans les technologies de médiation numérique, d’après Roei Amit, en charge du digital et du multimédia à la Réunion des Musées Nationaux - Grand Palais.

L’exposition virtuelle « Noir et Blanc » a attiré 320 visiteurs lors de son weekend d’ouverture.  - © D.R.
L’exposition virtuelle « Noir et Blanc » a attiré 320 visiteurs lors de son weekend d’ouverture. - © D.R.

Dans quelle mesure la crise actuelle a-t-elle accéléré les stratégies du Grand Palais en terme de numérique et quel premier bilan en faites-vous, avant la réouvertures des musées ? 

Le Grand Palais était déjà engagé depuis des années dans le numérique, mais la situation nous a donné l’occasion d’expérimenter davantage. Les visiteurs changent, leurs usages aussi, c’est une tendance qui s’observe depuis un moment, et qui est poussée à son paroxysme par la pandémie. 

Nous avons donc engagé des moyens plus importants dans nos supports numériques, et travaillons avec nos partenaires sur de nouvelles formes. Il s’agira par exemple de mélanger les technologies au sein d’une même visite virtuelle, afin de dynamiser et fluidifier l’expérience du visiteur. L’exposition que nous proposons actuellement en ligne, Noir et Blanc, est basée sur de la photogrammétrie, et consiste en une balade dans un environnement numérisé par cette technologie. À l’avenir, une visite pourrait aussi proposer des vidéos en 360°, des modèles 3D, de l’interaction et d’autres typologies de médias.

C’est notre prestataire My Tour Live qui travaille sur ces supports, pour le Grand Palais comme pour d’autres lieux du réseau Réunion des Musées Nationaux (RMN). Nous utilisons aussi l’application Explor Visit comme plateforme. Les locaux de la RMN sont aussi en train d’être aménagés afin d’accueillir son propre studio pour plus d’autonomie. 

80 % des participants à nos cours en ligne ne sont pas parisiens.

D’autre part, les cours et conférences que proposait déjà le Grand Palais ont été entièrement basculés en ligne, avec des scores d’audience intéressants. Cette offre s’est finalisée à l’automne dernier, notre auditorium a été transformé, et nous proposons désormais plus de 120 cours en ligne, auxquels ont assisté 8 000 personnes.

L’élargissement du public que nous visions avec cette offre numérique s’est déjà vérifié. Concernant les cours par exemple, 80 % de ceux qui y ont participé ne sont pas parisiens. 30 % sont franciliens, et 50 % viennent d’ailleurs en France, voire de l’étranger.

L’exposition Noir et Blanc se décline en deux formules numériques payantes. Comment avez-vous défini ces offres ? 

Les précédentes déclinaisons virtuelles de nos expositions étaient gratuites. Pour l’exposition Bohèmes ou Pompéï plus récemment, il ne s’agissait pas tout à fait de visites de l’exposition elle-même, mais de contenus supplémentaires, une expérience en propre, qui ne reprenait pas forcément les contenus à découvrir sur place. Nous avions reçu le soutien du service « Innovation Numérique » du Ministère de la Culture pour ces projets.

Visite virtuelle de l’exposition « Noir et Blanc », disponible jusqu’au 18 juin.  - © D.R.
Visite virtuelle de l’exposition « Noir et Blanc », disponible jusqu’au 18 juin. - © D.R.

Pour Noir et Blanc, la visite virtuelle s’est faite entièrement avec le budget du Grand Palais, exprimant ainsi un véritable engagement sur le numérique au long terme. C’est une exposition qui a été déjà décalée trois fois, et n’a pas connu d’ouverture au public en présentiel. Nous avons seulement pu la numériser, et elle a déjà été démontée. 

Deux types de visite sont possible. La première se passe en autonomie, à son propre rythme, avec un audioguide, et un ticket d’entrée à 4 euros. La seconde se déroule avec un conférencier, en direct pendant une heure, et coûte 8 euros. Nous proposons 6 conférences par semaine, auxquelles peuvent assister 25 personnes à chaque fois. 

La durée moyenne des visites en autonomie est de 25 minutes.

Nous observons pour l’instant que la durée moyenne des visites en autonomie est de 25 minutes, ce qui est un chiffre satisfaisant en comparaison avec ceux d’autres offres en ligne. Après un premier week-end d’exploitation, nous comptions déjà 320 visiteurs virtuels, et 100 réservations avec conférencier. 

La monétisation des tickets d’entrée virtuels repose sur deux constats : c’est une façon d’engager le visiteur, et également de valoriser l’exposition et le travail qu’elle a nécessité, notamment dans le cas de Noir et Blanc sur lequel des dizaines de personnes ont collaboré. 

Comment le Grand Palais anticipe-t-il la réouverture des musées et, plus précisément, la sienne ? 

Le bâtiment entre dans une grande période de travaux. L’électricité a déjà été débranchée, et le chantier est entamé. Nous visons une réouverture pour 2024, année des Jeux Olympiques. Nous disposerons d’un espace éphémère sur cette période, une structure de 10 000 mètres carrés face à l’École Militaire (Paris 7e), en cours de finalisation. Elle accueillera de grands événements comme la Foire Internationale d’Art Contemporain (FIAC), dès que cela sera à nouveau permis. Nous espérons pouvoir ouvrir cet espace à la mi-juin, avec le Palais Augmenté, premier festival de création artistique en réalité augmentée.