Avignon : la Scala Provence, un ancien cinéma transformé en plus grand lieu du Off
Par Thomas Corlin | Le | Lieux, résidences, locaux de répétition
Nouveau venu dans le paysage du Off Avignonnais : la Scala Provence, plus gros volume couvert de la Ville après l’Opéra. Son propriétaire, Frederic Biessy, y projette à la fois un lieu de création annexe à son établissement parisien, la Scala (10e), une nouvelle adresse pour le spectacle et une chapelle pour la musique, classique ou actuelle, au sein du festival.
Le lancement de la Scala Provence découle-t-il d’une envie de s’implanter dans le Sud ou d’une autre nécessité ?
Plutôt d’un besoin qui est né avec la pandémie. La Scala parisienne disposait pendant un temps d’un studio de répétition, qui a été transformé en salle de spectacle, la Piccola Scala, consacrée à l’émergence. J’étais donc à la recherche d’un lieu de création et de résidence. Les éditions Actes Sud m’ont signalé qu’un vieux cinéma avignonnais, le Capitole, était en vente, et j’ai instantanément saisi son potentiel lorsque je l’ai visité. Son localisation était fortuite, mais je me réjouissais naturellement de mener ce projet dans la capitale française de la production théâtrale.
Quelles sont les propriétés du lieu et comment l’avez-vous investi ?
Le Capitole s’étale sur 3 000 m2, répartis sur quatre salles : la plus grande, de 640 places, possède une scène d’une ouverture de 19 mètres, les autres salles ont respectivement des jauges de 220, 120 et 60 places. Il s’agit, après l’Opéra, de la plus grosse salle couverte d’Avignon, In et Off confondus.
C’était un cinéma qui a connu son âge d’or entre 1935 et 1970. Depuis, il a été parfois utilisé pour le festival, et un artiste le louait occasionnellement, toujours dans son jus. Il ne fonctionnait plus au moment de sa mise en vente, mais ses fondations étaient saines. J’ai néanmoins tout rénové, pour 4 M€ de travaux : les espaces ont été récurés, la plomberie refaite, les salles équipées, notamment de 300 projecteurs, etc. Par delà cette remise en état, j’ai porté un soin particulier à la décoration et à l’apparence générale du lieu, dont j’ai voulu restituer la superbe et l’esprit d’origine. J’ai fait remettre du granito dans le hall, attaché beaucoup d’importance au Bleu Scala conçu par Armani, et demandé à Mathieu Lustrerie de restaurer des éléments historiques du lieu, notamment ses appliques en laiton de 1930.
Ces travaux ont été soutenus par la DGCA via la DRAC, et la Région Grand Sud.
Comment s’articule votre projet de résidence dans le lieu ?
J’ai aménagé cinq studios pour héberger les artistes et embauché une cuisinière à temps plein. Toutes les salles peuvent être utilisées pour répéter des spectacles ou des projets musicaux. Elles ont été équipées à cet effet, avec une acoustique pensée par Amadeus pour permettre des enregistrements holophoniques et simuler toutes les spatialisations sonores - écho, conditions studio, etc. La Scala disposant désormais d’un label, Scala Music, nous portons de nombreux projets musicaux et la Scala Provence les hébergera.
Nos tarifs de résidence n’assassinent pas les productions.
La durée standard d’une résidence sera d’un mois, mais cela peut-être adapté aux besoins artistiques du projet. Une participation aux frais de fonctionnement du lieu est demandé à la compagnie ou au producteur, mais nous faisons en sorte qu’elle « n’assassine » pas la trésorerie du projet. En contrepartie de ce geste, nous demandons trois ou quatre représentations offertes, en sortie de résidence.
Quel est l’axe de programmation choisi pour le festival, puis le reste de l’année ?
L’année sera rythmée par des sorties de résidence, mais également par certains spectacles qui auront déjà tourné à la Scala parisienne. La Scala Provence s’ajoutera aux quelques autres théâtres avignonnais, comme les Halles ou le Chêne Noir, qui proposent une programmation hors festival.
Pour cet été, nous présenterons 30 spectacles par jour, en cumulant toutes nos salles. Il y aura du théâtre bien sûr, de la danse, du cirque, mais aussi des propositions plus hybrides, mêlant le numérique et les arts plastiques. Nous ne programmerons pas beaucoup d’humour, notamment parce qu’il y en a déjà beaucoup dans d’autres établissements de l’avenue de la République, mais aussi parce que le réseau d’humoristes que nous diffusons est québécois et qu’il est au Festival du Rire de Montréal à cette période-là.
C’est aussi la musique que nous voulons remettre en avant dans le Off d’Avignon, et qui a un peu été délaissée ces dernières décennies. Nous avons lancé le festival avec DJ Chloé, puis Francesco Tristano ou Renaud Capuçon plus tard dans le mois.