Nice : l’Opéra ouvre sa saison avec un mini-festival de metal
Par Thomas Corlin | Le | Diffusion, booking
Du metal à l’opéra ? C’est chose faite à Nice (Alpes-Maritimes), où l'Opéra a ouvert sa saison avec une journée de concerts metal. L’opération a fait salle comble, mélangeant amateurs du genre et habitués du lieu, d’après son directeur général Bertrand Rossi.
Comment Metal Up The Opera a-t-il été reçu par le public - habitué ou non ?
L’événement a été un réussite à bien des égards. En salle, il a réuni près de 1 000 personnes, il ne restait plus de places une semaine avant la date. En extérieur, nous estimons que les concerts gratuits ont attiré près de 2 000 personnes. J’ai observé une grande mixité dans le public : c’était inter-générationnel, avec une majorité entre 40 et 50 ans, et j’ai aussi eu la surprise de voir des réguliers de l’opéra à l’année, venus par curiosité, ou justement parce qu’ils étaient aussi amateurs de metal.
Quelle forme a pris ce mini-festival et quels aménagements a-t-il nécessités ?
L’après-midi, quatre groupes ont joué gratuitement en extérieur, puis, le soir, trois ont joué en salle, au tarif de 25 € (et 14€ pour les adhérents de l’association Imago avec laquelle nous avons collaboré), en placement libre. Nous avons laissé les sièges habituels de la salle, et le public est resté tout à fait respectueux des lieux - le groupe final, les Tambours du Bronx, a invité le public à se lever à la fin, ce qui s’est passé sans aucun problème. Un DJ de metal a animé le foyer entre les concerts, une exposition d’artistes de l’univers metal a été accrochée et nous avions aussi prévu une tireuse à bières pour coller à l’ambiance - les boissons n’étaient toutefois pas autorisées en salle.
Quelle était la démarche artistique derrière ce choix de programmation ?
Il ne s’agit ni d’un « coup », ni d’une stratégie de communication. J’avais déjà organisé un événement de ce type lorsque je travaillais à l’Opéra National du Rhin à Strasbourg. Le metal s’inspire en partie de l’opéra en tant qu’art total. Plusieurs musiciens « métalleux » viennent du classique, et les compositions de ces groupes reprennent parfois des motifs du répertoire ancien, comme les Quatre Saisons de Vivaldi, le Requiem de Verdi ou les passages les plus épiques de Wagner.
Il ne s’agit ni d’un « coup », ni d’une stratégie de communication.
Par ailleurs, l’opéra est un genre historiquement populaire, et notre établissement se doit d’être ouvert au public le plus large. Programmer ce festival connecte l’opéra à d’autres courants artistiques, et d’autres spectateurs. C’est un geste fort de programmation : nous sommes un des premiers opéras à ouvrir en France, avec celui de Paris, et nous inaugurons avec cet événement qui nous connecte aux musiques actuelles. Ce n’est pas tout à fait hors de propos dans un lieu comme le nôtre et il y a des précédents : en 1948, l’Opéra de Nice avait reçu un festival de jazz, et nous organisons d’ailleurs ponctuellement des cafés jazz aujourd’hui. Enfin, le metal n’est pas le seul courant actuel que nous avons programmé : Sofiane Pamart avait déjà joué ici avec un orchestre. Pour autant, cela ne va pas dire que nous reprogrammerons régulièrement du metal ou d’autres musiques actuelles dans l’année, mais cela fait partie d’une logique d’ouverture que nous défendons.
Avec quels partenaires Metal Up the Opera a-t-il été organisé ?
Le groupe local Heart Attack avait déjà collaboré avec l’opéra pour y tourner un clip pendant le confinement. C’est d’eux que l’initiative est venue et c’est ainsi que nous avons été connectés à Imago Records, une structure niçoise fondée en 2005, d’habitude plus portée sur le jazz, avec laquelle nous avons co-produit l’événement. Nous nous sommes appuyés sur un réseau différent : en billetterie, nous avons travaillé avec d’autres opérateurs en ligne tels que Ticketmaster ou Ticketnet, et, en programmation, avec des intermédiaires inhabituels pour notre lieu.
En termes de moyens, l’Opéra a mis à disposition son espace, son personnel de sécurité et d’accueil, ses lumières, son matériel de scène (pour l’extérieur) mais nous avons dû louer du matériel son, puisque les concerts normalement programmés ici sont peu ou pas amplifiés. Nos peintres ont par ailleurs peint une toile en résonance avec l’univers du metal. Imago ont pris en charge le cachet des groupes.