Musiques actuelles : au Trabendo (Paris 19e), le public présent pour un automne allégé
Par Thomas Corlin | Le | Diffusion, booking
Très portée sur les artistes internationaux, la salle de concert privée le Trabendo (Paris 19e) opte pour une reprise modeste, du moins sur l’automne, dont le volume de dates a été revu sérieusement à la baisse. Grâce à la fidélité du public pop-rock, les dates se remplissent correctement malgré tout, d’après son programmateur Mathieu Meyer.
Comment la programmation du Trabendo, très portée sur la scène internationale, s’est-elle composée dans ce contexte ?
Sur un automne normal, nous programmons 70 événements ; cette fois-ci, il n’y en a que 25.
Historiquement, notre programmation est presque entièrement constituée d’artistes internationaux dans un large spectre de musiques actuelles allant du metal au folk, avec une grosse dominante pop-rock. Ce n’est pas contre la scène française, que nous aimons beaucoup et qui y joue occasionnellement, mais c’est juste une réalité. Forcément, cet entre-deux post-crise complique notre travail.
Il est à ajouter que nous sommes une salle privée, c’est-à-dire que les murs du Trabendo nous sont confiés par la Ville, et que nous en sommes les exploitants à travers une société intitulée Electric Dreams. Ainsi notre salle accueille des projets selon une logique de mise en location. Notre marge de risque est donc différente, et la pandémie, avec ses restrictions de jauges notamment, nous a forcé à repenser l’économie de nos concerts et à réduire certains coûts - nous sommes encore contraints à 75 % du public en debout, nous faisant passer de 700 places à 525. Nous ne sommes pas scientifiques pour en débattre, mais nous espérons que le pass sanitaire nous permettra à un moment de jouer en jauge pleine.
À la lumière de tout cela, nous avons programmé prudemment : sur un automne normal, nous programmons 70 événements ; cette fois-ci, il n’y en a que 25. Toutes les dates qui sont programmées à ce moment-là sont des paris avec des producteurs qui ont envie d’y croire. D’autres ont pris moins de risques : dès le mois de mai, pratiquement toute notre programmation de rentrée 2021 a été reportée sur 2022. Pour chaque concert automnal, nous avons prévu une date alternative en cas d’annulation.
Comment le public reprend-il ses habitudes chez vous ?
Nous procédons en trois temps. L’été dernier, nous avons fait une programmation gratuite sur notre terrasse, en co-réalisation avec le Supersonic (Paris 12e). Cela s’est fait à raison de cinq soirs par semaine, c’était nouveau pour nous, et le public est venu. Vient maintenant la réouverture de notre salle intérieure et une proposition d’une vingtaine de concerts sur l’automne pour voir comment les choses repartent avant, afin, si tout se passe bien, de reprendre un volume normal de concerts sur 2022 - qui sera même très soutenu à cause des multiples reports.
La situation nous fait reconsidérer l’économie de notre programmation.
Nous nous estimons chanceux parce que notre public est présent, et que les dates mises en vente se remplissent bien voire très bien. Cela est à mettre sur le compte de la typologie de notre public et des esthétiques que nous couvrons. Il s’agit en grande partie de fans de musique, sur des esthétiques fortes et avec des groupes cultes, pour lesquels aller en concert est une pratique courante, qu’ils reprennent presque automatiquement. Nous souffrons peut-être moins que bien des salles aux identités plus généralistes, avec un public moins engagé.
Comment l’application du pass sanitaire s’est-elle déroulée chez vous ?
Nous embauchons, chaque soir, une à deux personnes supplémentaires uniquement pour le contrôle des pass.
Nous avons eu des soucis avec des personnes virulentes, heureusement la plupart du temps en ligne. Il nous a été reproché, bien sûr, de l’appliquer et ainsi d’être le suppôt du gouvernement, mais aussi, à l’inverse, de ne pas l’appliquer assez bien et ainsi de ne pas proposer un espace assez sûr pour y voir des concerts. Nous regrettons qu’une partie du public ne comprenne pas que nous subissons la situation comme tout le monde et y faisons face avec nos moyens, en prenant nos responsabilités comme nous le pouvons. Nous embauchons, chaque soir, une à deux personnes supplémentaires uniquement pour le contrôle des pass.
Par ailleurs, nous notons que de nombreux spectateurs ne comprennent pas non plus l’annulation et le report de certaines dates alors que les concerts sont à nouveau autorisés. Il faut se figurer que certains groupes assez installés sont entrés dans des logiques de calendrier où une tournée est censée coïncider avec la sortie d’un album, et que si celle-ci est repoussée, la tournée l’est également.