Résidence : Artagon héberge 50 artistes et projets culturels dans l’ancienne usine Ricard à Marseille
Par Thomas Corlin | Le | Lieux, résidences, locaux de répétition
“Lieu de production, de transmission et de partage dédié à la création émergente”, Artagon s’est ajouté au paysage culturel marseillais cette année, sur invitation de la structure d’économie sociale et solidaire L’Épopée. Piloté par une association en soutien à la professionnalisation des artistes en sortie d’école, son co-fondateur Keimis Henni le veut ouvert sur son environnement, dans les quartiers nord de la ville.
Quelles sont les modalités de résidence d’Artagon et combien de personnes y travaillent ?
Il ne s’agit pas de fournir des espaces à des artistes de passage. La volonté de s’investir dans la programmation du lieu et son implantation dans le quartier a été déterminante.
Nos espaces sont occupés par 50 projets, sélectionnés par l’association Artagon, dont Anna Labouze et moi-même avons la gestion. Un appel à candidatures a été lancé au printemps dernier, et nous avons retenu les projets qui nous ont semblé les plus originaux, qualitatifs, et en lien avec Marseille et sa région. Il ne s’agit pas de fournir des espaces à des artistes de passage, ou dont la pratique et la carrière ne se développent pas sur le territoire, mais bel et bien des locaux, des nouveaux arrivants ou des natifs qui reviendraient s’installer à Marseille pour s’y engager durablement. La volonté de s’investir dans la programmation du lieu et son implantation dans le quartier a aussi été déterminante.
Sur les 500 candidatures, nous en avons donc retenues 50. Parmi celles là, 25 sont des artistes, tous champs confondus, et 25 sont des porteurs de projets culturels (médiateurs, médias, collectifs engagés dans la production, maisons d’édition, jeu vidéo, cuisine, paysagisme, urbanisme, architecture). Ces résidents paient une cotisation annuelle de 200 euros, et sont invités à y rester environ an an et demi pour développer leur projet puis l’emmener ailleurs, sur le modèle de l’incubation.
Comment l’association Artagon a-t-elle pris la gestion de cet espace ?
Anna et moi-même travaillons à la fois comme directeurs artistiques aux Magasins Généraux à Pantin (Seine-Saint-Denis) et enseignants à la Sorbonne (sur l’art contemporain et son exposition). En parallèle, nous gérons Artagon, qui recense les besoins d’artistes en sortie d’école à travers l’Europe, pour diffuser leur travail et les professionnaliser. Cela prend la forme de programmes de formation, d’accompagnement, comme d’expositions dans divers lieux (anciens bureaux, hôtels particuliers, etc). Pendant le confinement, nous avons notamment créé un fonds de soutien : une collecte de 62 000 euros auprès de mécènes a été répartie entre 308 étudiants. Nous proposerons également une autre bourse d’ici la fin de l’année. En étudiant les besoins de ces artistes en développement (ainsi que des jeunes curateurs, qui partagent des problématiques similaires), il a semblé qu’un espace dédié pourrait être une façon d’y répondre.
L’équipement du lieu est encore en cours : machines, salle de montage, studio son, sont en cours d’aménagement.
Nous avons rencontré l’Épopée (Marseille 14e), conglomérat de l’économie sociale et solidaire, implanté dans un quartier socialement isolé. Il est géré par l’association Synergie Family, une délégation de service public en charge de maisons de quartier, de centres de loisirs, d’animations éducatives, profitant à 30 000 jeunes du secteur Sainte-Marthe. Elle a également récupéré l’ancien siège social et atelier de Ricard, de 2 000 mètres carrés, et souhaitait le consacrer à un chantier culturel. Nous avons répondu à leur appel à manifestations d’intérêt, et bénéficions désormais d’une mise à disposition de cet espace pour y déployer notre projet - nous ne payons que les charges et une petite redevance.
Le choix d’implanter ce projet à Marseille s’est également révélé pertinent puisque les artistes émergents sont de plus en plus nombreux à s’y installer.
Avec quels moyens le lieu est-il équipé ?
Nous avons dû prendre possession du lieu en février et y faire des travaux, pour l’ouvrir pendant la foire d’art contemporain Artorama fin août. Nous avons puisé dans les financements étatiques de l’association, pour les re-flêcher sur ce projet marseillais. Nous disposons également des soutiens de l’ADAGP, de la Fondation Carasso, et nous déposons nos demandes auprès de la Région, du Département et de la Ville de Marseille. Trois salariés et deux services civiques ont été recrutés pour gérer le projet. Nous envisageons de recruter une autre personne aux partenariats, et pour faire de la location d’espace et financer la vie du bâtiment.
L’équipement du lieu est encore en cours : machines, salle de montage, studio son, sont en cours d’aménagement. Un centre de documentation est aussi en cours d’élaboration.
Artagon Marseille est-il également ouvert au public ?
Nous proposons une programmation ouverte à la fois au quartier et à un public plus large. Des projections de films tournés à Marseille, des rencontres, débats, des stages de photo ou de design proposés par les résidents eux-mêmes, ont lieu toute l’année. Le 22 janvier, nous accueillons le festival d’arts vivants Parallèle pour une nuit complète de performances.