Musiques actuelles : à Nice, la Ville ouvre le Stockfish, « la plus petite des grandes salles »
Par Thomas Corlin | Le | Diffusion, booking
Depuis le 9 mars 2022, Nice (Alpes-Maritimes) est dotée d’une nouvelle salle de concert, le Stockfish, prise en charge par la Ville. Adjoint à la jeunesse, à la cohésion sociale et à l’insertion professionnelle, Craig Monetti en assure la programmation,et imagine déjà un projet sur le long terme.
Dans quel espace s’ouvre le Stockfish et sur quelle impulsion a été lancé ce nouvel équipement ?
Il s’agit d’une salle de spectacle et réception située à l’intérieur de la Maison de l’Étudiant - où siègent le Crous, l’aide à l’alimentation, aux transports, etc. Sa jauge est de 700 places debout et 300 assises, et donne ainsi l’impression d’une grande salle aux dimensions intimistes - nous la décrivons d’ailleurs comme « la plus petite des grandes salles ». Elle n’était jusque là utilisée que pour de l’événementiel, essentiellement associatif, à raison d’une centaine de réservations par an.
Pendant la pandémie, où le rôle de la culture a souvent été négligé et l’avenir des salles mis en péril, le maire de la Ville et moi-même ont travaillé sur un projet qui marquerait la relance de la culture, et de la musique en particulier. Ainsi est né le Stockfish, après des travaux de rénovation et une nouvelle décoration (notamment sur le plafond du lieu, où des commandes ont été passées à des artistes, qui ont retravaillé une œuvre de Matisse et un portrait de Joséphine Baker).
Ces travaux impliquent notamment l’accueil des artistes, le lieu propose quatre loges de très grande taille, et de salles de répétition à l’usage de musiciens comme de danseurs. Un parking est également privatisé pour les tour bus.
Quel en est l’axe artistique et comment s’insère-t-il dans le parc des autres salles de concert niçoises ?
La programmation est composée à 80 % de concerts et 20 % d’humour. Sur le versant musical, il s’agit d’inviter dans un cadre intimiste des artistes qui ont l’habitude de jouer devant des jauges de 2 à 8 000 personnes, et, si possible, de les présenter dans une formule différente. Synapson, par exemple, a joué dans une formule électronique-acoustique avec une dizaine de musiciens pour une de nos soirées d’ouverture. Nous pouvons inviter des artistes qui tournent des Zénith, tout comme des groupes en développement. Je m’inspire pour ce projet de salles parisiennes comme le Bus Palladium et le Divan du Monde, ou du Transbordeur à Lyon.
Le Stockfish a tout d’une Smac, sauf le label.
J’assure pour l’instant moi-même la programmation, et travaille occasionnellement avec des partenaires locaux sur divers projets, comme le festival La Crème à Villefranche-sur-Mer, Panda Events ou Directo Productions.
Naturellement, Nice dispose déjà de plusieurs salles de concert, comme le Frigo 16 ou le Théâtre Lino Ventura (dont la jauge est proche de celle du Stockfish), ou d’autres de volumes différents qui travaillent sur des publics et des esthétiques différents. Nous veillons ensemble à éviter les chevauchements de dates pour que chacun puisse travailler sereinement.
Quels moyens sont déployés sur cette salle ?
La rénovation technique a coûté 130 000 € et le fonctionnement du lieu s’élève à 200 000 € à l’année, pour une équipe de six à sept permanents. Pour l’instant, le Stockfish est pris en charge presque à 100 % par la Ville. Juridiquement, il s’agit d’une salle municipale - elle a pourtant presque tout d’une Smac, sauf le label. À terme, il s’agirait de diversifier les sources de revenus du Stockfish, avec du sponsoring et d’autres financements privés.
Quelle politique tarifaire appliquez-vous ?
Dans un premier temps, elle demeurera très douce, nous ne visons pas encore la rentabilisation des événements. Il s’agit, sur ces deux premières années, d’installer le Stockfish dans le paysage et auprès des habitants. Ainsi, à titre d’exemple, le lancement était gratuit, et nous pouvons faire jouer un artiste comme Yuksek pour 5 €. Selon les esthétiques et le public concerné, l’entrée peut monter jusqu’à 20 €.
La buvette est également pensée dans une optique caritative : à chaque concert, les recettes du bar sont reversées à une association différente, qu’il s’agisse d’un orphelinat ukrainien ou d’un projet de ramassage de déchets.
Quels développements envisagez-vous pour le lieu ?
Une fois le lieu bien implanté, nous envisageons déjà des résidences d’artistes, qui déboucheraient sur un concert final. Sur les années à suivre, nous souhaiterions proposer des événements hors les murs, ouvrir une salle d’enregistrement, puis, qui sait, ouvrir une seconde salle à Paris sur le même modèle.