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Livestream : la plateforme Opsis TV multiplie les offres pendant le confinement

Par Thomas Corlin | Le | Diffusion, booking

Créée en 2017, Opsis TV a pu mettre en avant son catalogue et ses prestations de captation pendant cette période où le spectacle se vit beaucoup en ligne. Chargée de communication, Guillemette Pinon rappelle que cet outil est un complément de l’offre déjà existante en salle, et non un substitut.

La plateforme d’Opsis TV réunit 1 000 abonnés.  - © D.R.
La plateforme d’Opsis TV réunit 1 000 abonnés. - © D.R.

Comment a évolué la demande de votre clientèle et de vos abonnés depuis le début de la crise ?

Le billet virtuel est au prix de 10 € : le spectacle aura une diffusion unique, à un horaire donné, et ne sera pas disponible en replay.

Nous comptons un millier d’abonnés sur Opsis, plus des clients « one-shot », mais aussi des professionnels, des médiathèques, des écoles, des institutionnels ou des collectivités. Avec le confinement, la demande s’est faite plus forte, car la consommation de vidéo à la demande (VOD) arrive désormais à maturité, elle est entré dans les mœurs. Les abonnements sont à la hausse, notamment du côté des musées, EHPAD ou autres. Cela nous a été bénéfique, et nous a également permis de tirer notre épingle du jeu par notre ancienneté sur ce marché - Opsis propose du spectacle vivant en ligne depuis 2017. 

Du côté des lieux de diffusion, les sollicitations ont été un peu plus nombreuses, et de nouveaux lieux sont venus vers nous. Nous avons par exemple engagé une collaboration avec le Théâtre du Petit Montparnasse, et continué celle avec le Théâtre du Lucernaire (Paris 6e), dont nous diffusons Ma radio, histoire amoureuse, un spectacle de Philippe Meyer le 2 décembre, dans une version « one-shot », disponible à la fois pour nos abonnés, mais aussi pour des visiteurs uniques, moyennant un billet virtuel à 10 € - le spectacle aura une diffusion unique, à un horaire donné, et ne sera pas disponible en replay. Il avait déjà rencontré un succès en public, et sera donc rejoué sur scène sans public cette fois-ci, exclusivement pour la diffusion en ligne.

Quelles offres avez-vous mises en place pour faire face à ces mutations ?

Ce mode d’accès multiple à un spectacle, soit par abonnement soit en « one-shot », est plutôt rare chez nous, et nous l’appliquons en vertu des circonstances. Les raisons sont multiples pour ne pas avoir envie de s’abonner à une plateforme, nous testons donc davantage ce format. Par ailleurs, nous avons proposé un mois d’abonnement gratuit lors du premier confinement, afin de capter un nouveau public potentiel et lui laisser le temps de savoir si notre offre lui est adaptée.

Aussi nous ne proposons généralement qu’un spectacle en livestream par mois. Courant décembre, nous en proposerons au moins trois, qui sont actuellement en train de se préciser. Également, six pièces furent accessibles gratuitement sur notre plateforme pendant le premier confinement. 

Quel accord vous lie aux théâtres avec lesquels vous collaborez et qui effectue la captation du spectacle ? 

Le plus souvent, les captations sont effectuées par Les Films d’Un Jour.

Les lieux ne sont pas engagés auprès de nous, nous faisons des prestations uniques. Dans le contrat pour la diffusion sur notre plateforme, 50 % de notre cachet est reversé au producteur de la captation (la structure de production audiovisuelle qui l’exécute) qui lui-même en reverse une partie (50 % en général, mais les accords peuvent varier) au producteur et ayants-droit du spectacle. Ce qui nous revient est investi dans la mise en ligne, le développement de la plateforme, etc. Ces questions de droits nous importent beaucoup naturellement, et nous sommes référencés à la SACD. Dans le cas de la pièce de Philippe Meyer diffusée avec le Lucernaire, le prix de 10 € a été fixé en harmonie avec ce qui se fait sur le marché, et avec les coûts techniques. 

Le plus souvent, les captations sont effectuées par Les Films d’Un Jour, spécialisés dans le spectacle vivant et le documentaire. Il arrive cependant que des lieux ou des artistes nous demandent de travailler avec une équipe en particulier, ou soient outillés pour le faire eux-mêmes. 

une partie du catalogue d’Opsis - © D.R.
une partie du catalogue d’Opsis - © D.R.

En se banalisant pendant la crise, le livestream fait débat dans le spectacle vivant, qui craint une concurrence avec la fréquentation « physique » des théâtres. Comment les deux supports peuvent-ils cohabiter ?

Certains théâtres ont toujours été réticents à la diffusion en ligne de leurs spectacles, et bien sûr c’est leur droit, c’est une question de choix, de stratégie. D’autres, qui collaborent avec nous, le font selon des clauses strictes : pas « d’achat à l’acte » de spectacle, replay sur une durée très limitée, etc., et c’est tout à fait normal. 

La bonne santé des théâtres est nécessaire à notre bonne santé.

Les lieux qui souhaitent figurer sur notre plateforme sont très divers. Nous diffusons autant de comédie, de musicals ou de jeune public, que de création contemporaine, de performance ou de danse, mais aussi des masterclasses ou des documentaires. Les raisons qui poussent des théâtres à travailler avec nous sont très diverses : atteindre un autre public, garder une trace d’un spectacle, constituer une archive facilement consultable (notamment pour des metteurs en scène ou comédiens qui souhaitent qu’une création ancienne qui ne tourne plus soit encore visible), etc.

L’outil numérique est prévu pour être un complément à l’offre déjà existante, et non une menace. Il s’agit de simplifier l’accès au spectacle et d’inciter à sa découverte. La bonne santé des théâtres est nécessaire à notre bonne santé, nous ne souhaiterons jamais que le spectacle en ligne supplante le spectacle en salle. 

Artistiquement et techniquement, est-ce que tous les spectacles se prêtent à la captation ?

Un travail en amont avec les créateurs du spectacle a souvent lieu : ceux qui le mettent en scène, ceux qui l’interprètent, ceux qui le produisent également. Nous faisons un repérage en amont, pour identifier les éléments compliqués à filmer, comme des lumières inadaptées à la vidéo. Nous essayons de faire en sorte que la captation soit la plus respectueuse du spectacle artistiquement. 

Dans l’ensemble, tout se prête à de la captation, y compris de très grands opéras ou du cirque. Parfois, les artistes souhaitent même exploiter le support pour transmettre une intention artistique. Denis Lavant s’était accordé avec l’équipe de cadrage pour que des flous ou des faux ratés soient intégrés en direct à la captation pour exprimer les troubles psychotiques du personnage qu’il incarnait dans Big Shots. Cependant, il arrive aussi que des artistes, des compagnies, des metteurs-en-scène, ne souhaitent pas être filmés, et c’est aussi un choix à respecter.