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Concert en ligne : Hypy, une start-up pour concrétiser les projets de livestream des artistes

Par Thomas Corlin | Le | Diffusion, booking

La start-up Hypy accompagne les artistes souhaitant tenter une expérience en livestream, comme Dionysos, dont la « Time Machine Experience » est diffusée une seconde fois le 29 avril. Ce premier projet annonce une série d’autres concerts en préparation, selon le co-fondateur Sébastien Prieto.

Le concert de Dionysos - © Daria Nelson
Le concert de Dionysos - © Daria Nelson

Comment s’est concrétisé ce projet de livestream autour de Dionysos ? 

J’ai de l’expérience en maisons de disque et en billetterie, et mon associé Laurent Chesneau en streaming et en création de contenu digital. Nous avons rapidement cherché à trouver des solutions pour proposer des expériences en streaming aux artistes musicaux dans cette période, et à trouver des formules permettant d’en produire sans pour autant monter une structure de production en temps que telle - nous ne disposons pas par exemple de réalisateurs attitrés. En sondant plusieurs artistes, la question qui revenait le plus souvent était : « qui finance la production ? ». En montant Hypy, nous voulons accompagner ces démarches : co-écrire, commercialiser, promouvoir et diffuser des spectacles sur mesure pour des artistes désirant s’essayer au support et offrir un projet unique à leur fanbase. 

Nous partons du principe que l’industrie du live devra compter avec le livestream après la crise.

En décembre, nous avons contacté le groupe Dionysos qui tournait une sorte de « plus produit » audiovisuel autour de la sortie de leur album à venir. Les répétitions étaient déjà engagées pour ce qui était alors un concert en acoustique destiné à être filmé. Nous avons proposé d’en faire un objet pour le livestream, et de le mettre davantage en scène pour lui donner une valeur ajoutée. La maison de disque Columbia avec laquelle ils sont en licence, et leur tourneur Auguri, ont été intéressés, et le groupe aussi.

Nous avons conçu avec le groupe un show thématisé avec costumes, une introduction avec une machine à remonter le temps, et une setlist particulière mêlant morceaux de catalogue et du nouvel album. La mise en scène a été travaillée, la production audiovisuelle également, afin de proposer un vrai objet visuel avec un univers onirique, une proposition artistique qui constitue un moment à offrir aux fans. 

Le tournage a eu lieu aux Trois Baudets, avec cinq caméras, un régisseur et un éclairagiste. Les billets, au tarif de 15 euros, ont été mis en vente en février, pour une diffusion le 4 mars à 21h - le spectacle a donc été monté et diffusé, non pas retransmis en direct. 1 300 connexions ont été comptabilisées, dont environ 300 invitations. 

Quels moyens et quel personnel a été nécessaires pour donner lieu à ce rendez-vous en ligne ? 

Une vingtaine de personnes ont travaillé sur ce projet au total. Financièrement, nous avons investi avec nos propres moyens, dans l’idée de nous faire une carte de visite pour de futures projets de ce type. Nous n’étions pas éligibles aux aides du CNC parce que notre projet dure moins de 53 minutes, et que nous n’avons pas de compte ouvert chez eux (avec co-producteur et diffuseur). N’ayant pas de licence spectacle, nous pouvons pas non plus percevoir celles du CNM (avec licence de spectacle). Les artistes et les techniciens ont touché des cachets normaux pour les répétitions et le tournage. Pour ce premier essai, certains d’entre nous ont cumulé plusieurs métiers, ce qui n’est bien sûr pas un modèle viable sur le long terme. 

Hypy a également pris en charge la communication autour du projet, avec l’aide du service communication de la salle. Les médias étaient très réceptifs, y compris la télévision, l’artiste ayant bien sûr une certaine stature, et l’actualité culturelle étant pratiquement inexistante.

Pour l’instant, le seul modèle que nous suivons est celui, classique, du producteur de spectacle : investir sur un spectacle dans l’attente d’un retour grâce sur la billetterie. Seulement, dans le cas du streaming, cela est plus complexe puisqu’il n’est pas possible de faire tourner le spectacle pour le rentabiliser. 

Quelle plateforme avez-vous utilisé pour diffuser le spectacle et quelle exploitation future envisagez-vous ? 

Le Time Machine Experience a pris pour thème les années 40. - © Daria Nelson
Le Time Machine Experience a pris pour thème les années 40. - © Daria Nelson

Nous sommes passés par le player et l’interface de billetterie Dice, un partenaire pour lequel j’ai déjà travaillé. Nous réfléchissons encore à la vie que peut avoir un tel objet, et bien sûr, la revente sur des plateformes VOD est envisagée, mais pour l’instant rien n’est fixé. Pour l’instant, une nouvelle diffusion est programmée le 29 avril pour accompagner la sortie du nouvel album. 

Comment s’organise le travail avec le producteur habituel du groupe pour un tel projet ? 

Auguri s’est montré positif sur le projet et nous a donné son accord. C’est notamment la data qui les intéresse : le livestream permet de récolter certaines données sur le public du groupe, qui peuvent être exploitables pour l’organisation de tournées physiques. Par exemple, nous savons que la moyenne d’âge du public de cette diffusion est de 43 ans, et que le spectacle a souvent été vu en famille. 

Quels sont les prochains livestreams qu’Hypy encadrera ? 

L’opération autour de Dionysos s’est déroulée assez rapidement, les démarches sur nos nouveaux projets sont plus longues, et nous visons des diffusions en septembre. Nous travaillons cette fois-ci sur des artistes français au profil international, pour sonder si le livestream peut justement profiter à un public étranger qui n’aurait jamais vu le groupe en concert dans son pays. Nous partons en tout cas du principe que l’industrie de la musique live ne sera plus la même après la crise, et que cette pratique restera sous une forme ou une autre.