Production

Clubbing : La Machine du Moulin Rouge expérimente l’ouverture le dimanche après-midi

Par Thomas Corlin | Le | Diffusion, booking

Même dans les clubs, où le public revient plus facilement, l’après-crise déclenche de nouvelles envies. Comme à la Machine du Moulin Rouge (Paris 18e), où se lancent les soirées en après-midi Perreo Supremo, dédiées au reggaeton (22 mai et 19 juin prochains). Anaïs Condado, programmatrice, témoigne d’une énergie différente et d’une curiosité des clubbeurs pour ces nouveaux formats.

Le clubbing remplit sans peine, mais les concerts sont à la baisse à la Machine. - © Tristan Conchon
Le clubbing remplit sans peine, mais les concerts sont à la baisse à la Machine. - © Tristan Conchon

Programmer un dimanche après-midi en club, est-ce une première pour la Machine et pour le clubbing en général ? 

Ni l’un ni l’autre. D’abord, c’est finalement assez répandu à l’étranger, notamment dans la sphère anglo-saxonne. Ensuite, la Machine avait déjà tenté quelques programmations de ce type : en 2014, les Sunday Roasts avaient connu quelques éditions et rencontré un certain succès. Des artistes électro, dub, de gros labels, étaient passés en après-midi, sur un bon sound-system : nous nous sommes rendus compte que cela pouvait intéresser, qu’il y avait ici un format à développer.

Pendant le confinement également, nous avons été amenés à accueillir du public en après-midi, lorsqu’il s’agissait de faire des événements-tests autour des contaminations en contexte musical - le nôtre fut d’ailleurs très concluant. Cela faisait partie de l’opération « Revenir, la nuit », et là encore nous avons observé une vraie demande pour ce format - même si le contexte était particulier. L’énergie est différente, l’horaire joue énormément, nous avons été convaincus qu’il y avait quelque chose à jouer de ce côté là. Le confinement a été pour nous un grand moment de réflexion sur d’autres façons de programmer, qui se concrétisent aujourd’hui.

En quoi consistent alors les après-midi Perreo Supremo ? 

Perreo Supremo est dédié à la culture reggaeton et à sa communauté. Il est centré sur la danse et rythmé par trois cours, débouchant sur un dancefloor festif à la fin. Pour l’instant il réunit une centaine de personnes, nous commençons petit, et nous verrons comment la proposition évolue. Le public dédié réagit bien, d’autres gens, notamment des partenaires que nous invitons pour programmer de nuit, viennent par curiosité. L’ouverture se fait de 14h à 23h, avec une entrée à 6€ (plus une inscription payante à un cours). Ouvrir en après-midi ne nécessite pas la même quantité de staff ni de sécurité, et nous permet donc ce type de billetterie. 

Comment se sont relancées les différentes activités de la Machine ? 

Côté concerts, le public quarantenaire aurait-il changé ses habitudes ? 

Le pôle clubbing bat son plein. Nous craignions une méfiance ou un désintérêt pour les endroits clos, cela n’a pas été le cas, nous bénéficions d’un vrai appétit de la part d’un public qui a été frustré pendant deux ans, et c’est un soulagement pour notre secteur de voir les choses se dérouler ainsi. 

L’activité culturelle au Bar à Bulles sur notre toit reprend bien, le lieu retrouve une programmation soutenue et se remplit facilement. Il joue pour beaucoup dans la convivialité des après-midi Perreo Supremo : il y a des allers-retours entre le toit et les autres espaces du club, c’est une configuration rare. 

En concerts, c’est autre chose. Le rap s’en sort bien parce que son public est jeune et dévoué, mais sur le reste, c’est bien plus difficile, et nous ne saurions dire si c’est un temps de redémarrage, ou si certaines scènes changent de visage. Des groupes anglo-saxons continuent encore à annuler leurs dates, ou à les décaler sur la saison prochaine, et nous voyons notre programmation concerts diminuer - un ou deux par semaine actuellement, contre trois en temps normal. Le public quarantenaire aurait-il changé ses habitudes ? 

L’augmentation des prix de l’énergie, des cachets et des transports a-t-elle un impact sur votre économie ? 

Hélas, oui, même si nous essayons de le limiter. Les transports en particulier ont explosé : il n’est plus rare de payer 490 € pour un aller-retour Paris-Berlin. Cela tend parfois les négociations puisque l’équilibre économique des soirées s’en ressent. En six ans, nous n’avions pas augmenté nos prix, il a pourtant fallu s’y résoudre, à hauteur d’un ou deux euros par entrée. 

Avez-vous conservé les mêmes partenaires depuis la crise ? 

Nous travaillons toujours avec Trax Magazine, notre partenaire média historique et nous nous serrons les coudes à travers cette crise. C’est du côté de la billetterie que nous avons conclu un nouveau partenariat : depuis septembre, nous avons signé avec Dice. Leur plateforme propose une mise en avant intéressante d’événements, et leur manière de réfléchir sur le long terme nous a attirés.