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Intermittence : une saison de reprise sous tension, d’après le SNAM-CGT

Par Thomas Corlin | Le | Rh, formation, intermittence

Reprise, sortie d’année blanche, nouveau gouvernement, GUSO : Philippe Gauthier et Michel Vié du SNAM-CGT font un point sur la situation des musiciens intermittents avant d’entamer l’été des festivals.

La reprise est inégale selon les esthétiques musicales.  - © D.R.
La reprise est inégale selon les esthétiques musicales. - © D.R.

À l’orée de la première saison de festivals sans restrictions sanitaires depuis la pandémie, les musiciens intermittents ont-ils retrouvé leur stabilité d’avant-crise ?

P. Gauthier : Certes, l’industrie est repartie de plus belle, tout le monde a voulu marquer le coup de la reprise, et c’est bel et bien « reparti ». Pour autant, la situation n’est pas celle de juin 2019. Le réseau des musiques actuelles est sous tension, de nombreux projets sont en attente de plus de visibilité pour se confirmer.

Les festivals sont très inquiets au moment de la vente des billets, et beaucoup craignent des taux de remplissage à 85 % - pour repère, la plupart des festivals rentrent dans leurs frais à 97 ou 98 % de remplissage, quand ce n’est pas 100 %. Avec la surenchère de têtes d’affiche commune à presque tous les événements de cet été, les pertes pourraient être dévastatrices. 

Il est aussi à noter que toutes les strates du secteur n’ont pas repris dans les mêmes proportions, et que certains sont encore à la traîne. Le classique et le jazz sont encore en souffrance : ils ont perdu une partie de leur public et cela affecte directement l’ambition des programmateurs. Les ensembles et les grandes formations, ont du mal à tourner, et le coût des sessions baisse. 

Enfin, les initiatives locales, associatives, ont, pour certaines, du mal à repartir, là encore faute de moyens. 

Quelles pourraient être les conséquences d’un été en dessous des attentes du secteur ? 

L’EAC n’a pas à être payée en Guso, sauf lorsqu’il y a spectacle devant public,

P. Gauthier : D’abord, une douche froide pourrait achever le moral de la filière, qui se remet encore difficilement du tunnel de la pandémie. Ensuite, l’emprise des grands groupes sur des structures en difficulté pourrait s’étendre encore. Par ailleurs, si le secteur a un chiffre d’affaire plus bas, les perceptions de la taxe sur le spectacle diminueront également, et les caisses du Centre National de la Musique avec. Les cachets des intermittents pourraient aussi baisser. En d’autres termes, une mauvaise saison de reprise présente le risque de voir se concrétiser l’accident industriel tant craint dans le secteur des festivals.

Comment s’est soldée la sortie de l’année blanche avec sa batterie de clauses d’exception ?

P. Gauthier : La majorité des intermittents ont été sauvés, malgré des incohérences dans le dispositif de sortie. Il subsiste encore des difficultés pour les intermittents qui ont, par exemple, donné des cours pendant la pandémie, bénéficié du régime général et ainsi mis à mal leur accès à l’année blanche. 

Quelles sont vos premières revendications auprès du nouveau Ministère de la Culture ? 

P. Gauthier : Ce nouveau gouvernement est encore fragile, nous ne sommes pas encore entrés en contact avec la Ministre. Cependant, une de nos préoccupations est la fin du dispositif d’aide d’aide à l’embauche du Fonpeps, officiellement maintenu jusqu’à la fin de l’année. Il a sauvé bien des petites salles, et nous réclamons sa reconduction. 

Une certaine ambiguïté plane encore sur le mode de rémunération des interventions d’EAC. Comment les clarifier ?

M. Vié : L’EAC n’a pas à être payée en Guso, sauf lorsqu’il y a spectacle devant public, par exemple lors de la restitution du travail d’écriture, de mise en scène, d’ateliers, etc. C’est une légende urbaine tenace d’affirmer que les municipalités (mais aussi tous les employeurs dont ce n’est pas l’activité principale, les « occasionnels ») ne peuvent pas déclarer plus de six Guso par an. Au-dessus de six spectacles, ils sont tenus de déclarer leur activité d’entrepreneur de spectacle auprès des DRAC (c’est l’obligation déclarative qui a remplacé l’autorisation d’exercer de la licence d’entrepreneur de spectacle), mais dès lors que c’est fait, le nombre de spectacles n’est pas limité. La demande des municipalités (et autres) de payer en prestation est une dérive générale, qu’il s’agisse de rémunérer du spectacle où des interventions d’EAC.

Il est certain que pour les artistes musiciens, il y a problème administratif puisqu’il doivent soit trouver un employeur pour s’intercaler entre eux et le véritable donneur d’ordre (et l’affaire SMART a démontré la fragilité de ce montage), soit créer et piloter une structure qui peut remettre en question la présomption de salariat que leur accorde le code du travail.