Formation : à Trempo, toujours autant d’artistes apprentis après la crise
Par Thomas Corlin | Le | Rh, formation, intermittence
Les préoccupations ne sont plus exactement les mêmes pour les artistes émergents, mais l’appétit est toujours intact, malgré la crise. L’organisme de formation nantais Trempo (Loire-Atlantique) adapte ses formations aux nouveaux besoins du secteur, d’après son directeur Olivier Tura.
Trempo existe depuis 1990. À quel besoin répondait alors le centre de formation ?
C’est un ensemble d’impulsions, locales et nationales, qui ont donné lieu à un endroit comme Trempo, qui à cette époque logeait dans une ancienne école primaire. Les musiques actuelles accédaient à une certaine reconnaissance, et les pouvoirs publics désiraient soutenir les acteurs culturels. Ainsi, Trempolino - tel était son nom alors - était consacré au rock, avant de s’étendre à toutes les musiques actuelles.
Initialement, l’organisme était ouvert aux musiciens comme aux professionnels de la musique, avec de se concentrer sur les musiciens seulement.
Que propose Trempo ?
Trempo travaille sur l’ensemble de la chaîne de création musicale des artistes émergents : studio de répétition, résidence de création, enregistrement, diffusion, et ceci jusqu’aux pratiques musicales en amateur et aux projets d’éducation.
Nous répondons à tous les besoins des artistes pour développer leur carrière. Chez nous, ils apprennent à se situer sur le marché musical, à développer un projet cohérent sur scène, à travailler les arrangements, à accompagner leur diffusion internationale, etc. Nous savons que les projets ne durent souvent pas dans le temps : il s’agit donc d’accompagner le début de carrière afin que les artistes sachent continuer à vivre de leur musique sous plusieurs formes. Maîtriser un autre instrument, développer des compétences connexes comme la musique à l’image, peuvent faire partie des atouts qui assurent une pérennité dans le domaine.
Comment se finance Trempo ?
Nous fonctionnons sur 60 % de financements publics et 40 % d’autofinancement (formations payantes, location de studios, bar, privatisation, etc.). Une trentaine de permanents travaillent ici, ainsi qu’une soixantaine de formateurs et intervenants extérieurs.
Quelles formules de formation proposez-vous et à quels publics s’adressent-elles ?
C’est variable. Il existe des modules d’accompagnement qui ne durent que deux ou trois jours, et des blocs complets qui s’étalent sur 12 mois - c’est le cas du programme Slash. Sur l’année 2021-2022, 432 musiciens sont passés chez nous. Parmi ceux-ci, beaucoup d’émergents bien sûr, mais le terme couvre différentes réalités. Il y a beaucoup de jeunes mais aussi des musiciens avec une carrière déjà engagée, qui souhaitent lancer un nouveau projet dans une esthétique différente et donner un tournant à leur carrière, d’où des besoins d’actualisation par rapport aux nouveaux usages du secteur.
La vraie question aujourd’hui est : comment durer dans le temps ?
Nous avons aussi lancé un nouveau format d’accompagnement cet été : le Summer Camp. Douze rappeuses amatrices des Pays de la Loire ont été formées à la production, aux médias, à la scène, par des intervenantes du monde du rap. Cette expérience se fait en non mixité, un outil envisagé comme temporaire pour permettre à des femmes d’échanger plus librement dans un secteur souvent dominé par les hommes, et elle est suivie par la sociologue Mélanie Gourvès.
Les formations sont-elles toutes payantes ?
Nous bénéficions de soutiens publics qui nous permettent de rendre gratuits certains de nos programmes, lorsqu’il y a sélection d’artistes. D’autres programmes sont pris en charge par le droit à la formation, et le plus souvent ne coûtent rien aux artistes - hélas, ce n’est pas encore le cas des jeunes artistes, qui n’ont pas encore ouvert leur droits. Les formations en studio sont le plus souvent payantes et sont généralement prises en charge par le label de l’artiste. Enfin, certains artistes choisissent des modules et le payent de le poche.
La pandémie a-t-elle entamé l’appétit pour la musique chez les jeunes artistes ?
Nous n’avons pas observé de diminution du nombre de demandes. Nous sommes toujours autant sollicités, et en 2021 nous avons même doublé le nombre de résidences et d’accompagnements (en compensation d’autres modules que nous ne pouvions assurer). La question commune à tous ces nouveaux artistes entrants est celle de la durabilité de leur carrière : comment durer sur la scène, mais aussi utiliser ses compétences pour se garantir des revenus ?